1.
paris
lorsque
je regarde le plafond je vois l’inverse du sol je vois
les
éclats
débris liquéfiés de toutes les choses que j’ai avalées de
travers qui ont
dégouliné
là-haut tout là-haut oui
c’est
une rétrospective de mes émois quel honneur
un
musée mobile, ouvert aux quatre vents
de
sorte à ce que chacun soit en mesure de
s’extasier
devant la teneur du propos d’acclamer la texture
de
mes
implacables
mais
tout ça j’en ai peur
va
finir par me retomber sur la tête
(donnez-lui
un peu de
donnez-lui
un peu de
un
peu de chaleur humaine
…
et
pourquoi pas ?)
2.
tokyo
je
tricote mes poèmes comme des pop songs et on n’y retrouve pas
toujours
la
logique commune une certaine idée de
de
ce qu’il est convenable de clamer pour être inconvenant
je
ne le sais que trop que je ne tire pas assez fort sur le pianiste je
n’ai pas
maudit
mes contemporains fait l’apologie des haillons
je
n’ai pas de gun
et je n’ai pas assez
de
mains pour tirer sur la corde juste des
doigts
(dix)
qui
flottent
là
à quelques centimètres de mes
jolis
moignons
je
n’aime pas la violence et je préfère dessiner des vulves
roses
et
pulpeuses
c’est
plus smooth
je
m’efforce pourtant de ne pas
de
ne pas dépasser de l’emballage
c’est
beau le plastique
et
les reflets sur le plastique
et
les couleurs™
qui dégoulinent
sur
le carton jusqu’à vous mettre la nausée ou peut-être était-ce
les néons (juste les néons oui
oui)
mais
vous m’achèteriez vous m’achèteriez oui
poupée
princesse soldée livrée à l’amusement
public
(ne
voyez-vous pas comme elle est innocente ?
ne
voyez-vous pas comme elle vous ressemble ?)
3.
londres
ils
m’ont dit qu’il y avait des lieux de rendez-vous secrets sous les
églises et je les
ai
crus
je
les ai crus oui
je
voulais virevolter juste virevolter parce qu’il ne restait plus
rien de pertinent
à
raconter
ce
soir-là du moins
et
tant pis oui tant pis si le monde était sens dessus dessous
on
n’allait pas changer le cours des choses
faire
remonter le sperme dans l’urètre
(pour
ainsi dire)
et
puis ça n’aurait pas servi à grand-chose
je
n’étais qu’une idole de coffee shops
mon
job était de prononcer tous les noms à l’envers (de tête, sans
les écrire)
et
on s’étonnait ensuite
que
je ne veuille plus
faire
l’amuseuse publique
vu
la dose de cynisme imposée
vu
comme on se foutait de moi quand je voulais faire du zèle
ou
lorsque le rimmel dégoulinait comme ça
sur
mes joues
et
que personne ne comprenait
que
je n’étais pas triste
(donnez-lui
un biscuit, vous la verrez chanter
donnez-lui
une caresse, vous la verrez bêler
donnez-lui
une idée, vous ne la verrez plus)
4.
berlin
on ne se rhabillait
après le spectacle
que lorsque c’était
vraiment nécessaire
il y avait certains
hommages rendus ici et là
à des gens qui ne
l’avaient pas vraiment mérité mais qui étaient là
et puis l’important
c’était de ne pas se retourner sur soi-même
et ça c’était
quelque chose
qu’ils avaient su
faire avec brio
moi j’avais juste un
joli chapeau (mais vraiment joli)
toutefois je pensais je
croyais tenir quelque chose
quelque chose oui
une opportunité de
déverser des torrents de glu de me rouler dedans en récitant
en
récitant les hymnes nationaux du monde (sans mélodie, juste le
rythme et les
mots)
et d’être acclamée
pour ça
ça n’a pas pris
ils m’ont dit que je
devais me contenter de poser
de poser oui
pas
de ratures,
on n’était pas là pour faire de l’art contemporain sûrement
pas
non
alors je me suis
inclinée et je suis sortie
par la petite porte
c’était plus simple
(elle s’est mise à
chanter sous la douche en hiver
à arracher un par
un les clous dans les murs
et à boucher les
trous avec de la bave
parce que ça sent
bon après quand ça sèche)
A.K.